Les scientifiques expliquent que le cerveau n’est pas, dans le champ de la recherche liée au marché (‘market research’), le véritable cerveau des clients: il s’agit du cerveau d’une société commerciale prenant soin du client et essayant d’apprendre comment bien gérer le client de manière à lui fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Il s’agit de connaître les clients, de les atteindre et de les ravir.
Ce cerveau n’oublie jamais aucun événement et a une mémoire photographique qui retient le mouvement du client, cherchant à lui faire faire la prochaine meilleure action possible. Et il ne s’agit pas seulement de collecter et d’analyser les données. Les décisions du cerveau sont pertinentes aussi bien pour le marketing dit “entrant” (‘inbound marketing’, où c’est le client qui fait un mouvement vers la société qui commercialise un produit, via un centre d’appel téléphonique ou une application mobile) que pour le marketing qualifié de “sortant” (‘outbound marketing’, où la société utilise l’email, les sms, la téléphonie ou le courrier postal, en vue de contacter le client). Ces deux formes de marketing sont centrées sur l’utilisateur, essayant de connaître les clients individuellement (comme le veulent les clients eux-mêmes) et de leur délivrer le bon message, la bonne offre et le bon niveau de service durant chaque communication.
Le cerveau du client aide à nourrir l’identité de la marque. Une marque n’est pas un logo, un produit, c’est une connection émotionnelle entre une société commerciale et ses clients, spécialement quand il s’agit de la nouvelle génération, les “millenials”, car ils sont la première génération à ne pas être connectés directement aux marques appréciées par leurs parents. Ils ont leurs opinions et croyances personnelles et c’est pourquoi les marques qui veulent les approcher doivent exprimer leur propre credo.
Beaucoup de compositeurs de musique, qui sont en quelque sorte leur propre marque, procèdent de cette manière. Ils disent: “La musique n’est pas ce que je fais, c’est qui je suis”. Quant à l’auditeur de musique qui est fan de musique populaire, il n’hésite pas à s’écrier: “La musique, c’est ma vie”. Comment cela se fait-il et quelles sont les conséquences de ce genre de perceptions? Nous pouvons dire que, pour les compositeurs de musique et pour leurs audiences, pour les stars de la pop et pour leurs fans clubs, la musique, c’est une question d’identité.
La musique a une identité. Qu’est-ce que cela veut dire? La musique peut être vue comme une météphore de l’identité. La musique a une identité parce que les gens qui la font, l’utilisent et lui donnent une forme, elle a donc une vie. L’identité de la musique est mouvante en ce sens qu’elle est un procédé, non une chose, un devenir, non un état fixe. Comme l’identité, la musique est à la fois une performance et une histoire qui décrit le social et l’individuel. La musique est une clé de l’identité parce qu’elle permet de trouver un sens au soi, un sens à l’altérité et qu’elle permet de créer des liens entre les gens.
Différents types d’activités musicales produisent différentes sortes d’identités musicales. Par exemple, la musique house d’ambiance (‘ambient house music’) combine la culture ‘rave’ et le minimalisme; la musique chrétienne est liée à un culte spécifique, même s’il a différentes formes. Cependant, la manière dont ces identités musicales fonctionnent est la même. Il s’agit de combiner une expérience intense en lien avec l’apprentissage aussi bien qu’avec l’émotion, le jugement de l’auditeur entrant en ligne de compte.
Les premières personnes à exprimer des jugements en lien avec la musique sont les musiciens eux-mêmes. Ils jugent la musique elle-même aussi bien que les contextes dans lesquels elle est accessible en ligne. Quand ils construisent leur identité musicale, ils font un mouvement professionnel. Ils veulent créer une image d’eux-mêmes en tant que professionnels de l’industrie musicale et que cette identité leur rapporte de l’attention, des fans et des revenus. Certains sont des créateurs de tendances dans certains genres musicaux spécifiques, exprimant ce que leur musique représente pour leur audience.
Par ailleurs, définissons ce qu’est exactement un “fan”. Le mot apparaît pour la 1re fois en anglais des Etats-Unis en 1899 et sont sens est alors celui de “dévot”, en lien avec la pratique du baseball. “Fan” est probablement une abbréviation de “fanatique”. L’étymologie la plus simple de ce terme est “fanum”, le mot latin qui désigne le temple. Quel est le lien entre “fanatique” et “temple”? Au 1er siècle ACN, les prêtres qui servaient Bellona, une déesse romaine de la guerre, répandaient du sang pendant un festival annuel. Ce comportement était considéré comme un ordre donné par la déesse et ce comportement était fanatique. C’est pour cela que le mot “fan”, quand il est apparu en anglais au 16e siècle, désignait une “personne possédée par une folie divine”.
Ceci dit, “fanatique” pourrait aussi être relié à “fancy”, provenant de “fantasy”, ce terme ayant, en anglais, des significations différentes: le penchant pour, le fait d’apprécier (milieu du 15e siècle), “l’imagination productive” (fin du 16e siècle), “l’image de fantaisie” (milieu du 17e siècle). Enfin, le mot “fan club” est apparu en 1930.
Un fan est une personne qui a un grand enthousiasme, généralement fort peu critique, pour une personne ou une cause. Ce zèle peut être excessif et irrationnel. Ceci dit, comment les fans sélectionnent-ils les musiques qui vont devenir partie intégrante de leur identité? Comme leur expérience de la musique est généralement liée à une identité personnelle, leurs choix vont dépendre de leurs réactions émotionnelles, de l’état de leurs corps et du contexte dans lequel ils trouvent la musique. En effet, l’identité est quelque chose que les gens essaient comme un vêtement, le prenant dans la culture.
Remarquons que les auditeurs créent leur identité en tant que fans de musique via des interactions symboliques. Dans ce contexte, le partage de musique, aussi bien que l’écoute musicale, est une représentation de l’identité musicale: les auditeurs de musique veulent montrer leur vrai “moi”. Par exemple, quand ils créent et partages des playlists, qui deviennent des formes d’expression personnelle reflétant un genre, une humeur ou une relation. En ce sens, les communautés de fans ne sont plus des communautés qui rendent une espèce de culte à leurs idoles, ou le sont moins.
Aujourd’hui, les fans veulent exprimer leur personnalité via leurs comptes sur les réseaux sociaux, trouver de nouveaux amis partageant leur passion musicale et même recevoir des récompenses de la part des stars ou de leurs managers.
Qu’est-ce que les fans de musique apportent, sur les médias sociaux? La découverte, l’intimité et l’identité collective. Ils peuvent parler de leurs stars favorites ou des festivals de musique, qui leur procurent généralement un grand divertissement. De temps à autre, ils évoquent des sujets plus sérieux et parlent par exemple de la manière don’t la musique préserve l’identité culturelle d’une communauté, aide à résoudre des problèmes liés au genre, et ainsi de suite.
Toutes leurs actions et réalités (la musique en tant que rituel, les fans dans les médias, les communautés de fans, etc) sont étudiées notamment dans le ‘Journal of Fandom Studies’ et les marques musicales prennent tout cela en compte quand elles ont des décisions à prendre en lien avec la production musicale.
Ceci dit, qu’est-ce que l’essence même du phénomène du fan? Socialement parlant, il s’agit d’être différent et apprécié parce que l’on est fan, à cause d’un état d’esprit particulier et d’une attitude qui est souvent interdite dans le contexte de la vie de tous les jours. La différence est exprimée par des interactions symboliques, vu que la musique est un système de signification symbolique qui laisse émerger le “soi”. Qu’est-ce que cela veut dire? Tout simplement que la musique fait émerger des communautés d’auditeurs qui partagent les mêmes symboles et les mêmes valeurs.