La connaissance qui transforme et la notion de ‘bildung’
Le savoir peut véritablement transformer qui l’acquiert. En fait, il le fait dans trois dimensions: psychologique (aidant à augmenter la compréhension de soi), comportementale (modifiant le mode de vie) et convictionnelle (pouvant mener à un remodelage des croyances). Il peut être acquis durant une transition de vie majeure, menant à un niveau plus élevé de conscience.
C’est le cas dans le domaine de la musique comme en tout autre domaine: le savoir transformationnel est pertinent et important pour la personne qui est musicalement éduquée. Par ailleurs, ce type spécifique de connaissance est liée à l’idée de ‘bildung’ musical. Ce mot signifie “éducation”, en allemand, sans toutefois être interchangeable avec d’autres mots désignant l’éducation. En fait, le savoir transformationnel est lié au fait de faire de la musique, ce qui inclut un “quoi”, un “comment” et un “quand”. La notion de ‘bildung’, quant à elle, suppose le fait de se cultiver personnellement, de manière autodidacte et elle est davantage liée à la notion d’intériorité, en relation avec l’esthétique des émotions.
Le bildung musical est en conséquence la constitution de sa personnalité au travers de et par la musique. C’est une sorte de transformation esthétique à travers le moyen spécifique qu’est la musique et cette transformation suppose une approche de nature qualitative. Les auditeurs de musique qui considèrent la musique comme un support idéal dans le cadre du développement personnel veulent d’abord devenir quelqu’un d’autre grâce à la musique. Il ne s’agit pas de quantité, car ils ne souhaitent apprendre que ce qui est utile dans le cadre de leur progression singulière et unique: une simple accumulation d’information musicale ne mène pas à la construction d’un bildung musical.
Bildung musical, éthique et sublime
Au-delà des considérations techniques, la notion de bildung musical donne une dimension éthique au savoir musical. Cependant il est difficile de savoir comment cela fonctionne, car le bildung musical est un processus qui est davantage passif qu’actif. Les auditeurs de musique eux-mêmes ne savent pas toujours comment la transformation se fait réellement. Prudemment, il serait possible de dire que les événements qui, dans une vie, affectent directement les auditeurs, sont ceux qui ont le plus de chances d’avoir un impact au niveau éthique qu’à d’autres niveaux. En ce sens, musique et éthique sont liés. Quoi qu’il en soit, tous les aspects de l’écoute musicale qui mènent à une meilleure connaissance de soi peuvent être vus comme faisant partie intégrante du bildung musical. C’est un savoir implicite, en connection avec les paradigmes esthétiques de l’émotion et de l’écoute. Par ailleurs, l’idée de bildung peut être reliée à la recherche de ce qui est sublime, même s’il n’y a généralement aucune garantie que l’écoute musicale mène à un changement dans une existence singulière à travers le sublime.
Dans cette branche de la philosophie appelée “esthétique”, qui essaie de définir des concepts comme la beauté, le goût et l’art, le sublime est la qualité de la grandeur, qu’elle soit en lien avec la vie éthique, intellectuelle, physiologique, etc. Ne désirant pas décrire les aspects ordinaires de la vie humaine, le sublime tend, au contraire, à parler des réalités qui sont exceptionnelles: une montagne étonnante, un esprit distinguer ou une pierre qui est rare. Le sublime peut être partout en musique: dans une structure musicale elle-même (par exemple, la “Neuvième Symphonie” de Beethoven) aussi bien que dans une chanson de pop inconnue, dont les paroles invitent à un amour plus grand. Le sublime musical est défini comme étant le plus haut pic auquel la musique peut prétendre. C’est dire que c’est là une notion très relative, qui est discutée parmi les spécialistes de la musique classique aussi bien que par les fans de musique populaire.